Surpopulation carcérale au Cameroun : Déni de Justice formel.

PLAIDOYER :

Déni de justice : Art. 7 al. 1 – d de la CHARTE AFRICAINE DES DROITS DE L’HOMME ET DES PEUPLES.

Le déni de justice tel que délimité au visa de l’art. 7al. 1 – d de la Charte Africaine des Droits de l’Homme et des Peuples, ancrée dans la Constitution camerounaise à travers son Préambule, entraîne comme conséquence directe, la surpopulation carcérale en Afrique, et particulièrement au Cameroun.

En vertu de l’art. 7 al. 1 – d de la Charte Africaine des Droits de l’Homme et des Peuples, « toute personne a droit à ce que sa cause soit entendue. Ce droit comprend :
d). le droit d’être jugé dans un délai raisonnable par une juridiction impartiale ».

Cette disposition consacre le principe de la célérité ou, en d’autres termes, prohibe le retard injustifié à statuer. L’autorité viole cette garantie conventionnelle, ancrée dans notre Constitution à travers son préambule, lorsqu’elle ne rend pas la décision qu’il lui incombe de prendre dans le délai prescrit par la loi ou dans un délai que la nature de l’affaire ainsi que toutes les autres circonstances font apparaître comme raisonnable. Le caractère raisonnable du délai s’apprécie selon les circonstances particulières de la cause, eu égard notamment à la complexité de l’affaire, à l’enjeu du litige pour l’intéressé, à son comportement ainsi qu’à celui des autorités compétentes.

Ainsi, il y a déni de justice formel lorsqu’une autorité n’applique pas ou applique d’une façon incorrecte une règle de procédure, de sorte qu’elle ferme l’accès à la justice au particulier qui, normalement, y aurait droit. L’autorité qui se refuse à statuer, ou ne le fait que partiellement, viole l’art. 7 al. 1 de la Charte Africaine des Droits de l’Homme et des Peuples.

Dans le cas du Cameroun, il faut remarquer, pour le regretter, que le ratio entre les personnes en détention provisoire et les personnes condamnées définitivement souffre d’un déséquilibre d’une ampleur considérable. La prison de Kondengui (Yaoundé), pour prendre cet exemple, compte à ce jour 3864 prisonniers (chiffres officiels), dont 3226 prévenus ; 450 condamnés définitivement ; 120 en instance d’appel et 68 en Cassation. Autant le dire, un véritable océan de misère.

Ainsi et l’attention du Ministre délégué auprès du Ministre de la Justice, Garde des sceaux, ce constat appelle une réflexion profonde sur la refonte de toute la chaine pénale qui semble manifestement s’essouffler face à l’afflux des procès qui ne cesse de s’amplifier sans que le corps judiciaire puisse, malgré d’immenses efforts et de trésors d’imaginations, absorber à la cadence voulue le flot des affaires nouvelles. La justice n’arrive plus à combler le retard. Dans ce contexte, s’en prendre aux seuls magistrats (sièges et parquet), voilà un autre mauvais procès. La réflexion que nous appelons à travers ce billet est d’abord, et entre autres solutions, d’ordre quantitatif et qualitatif, relativement au nombre de magistrats ainsi qu’à leur formation.

Charly Noah,
Président de l’ONG ACTION 237-SUISSE